« 30 Days of Biking » a fêté ses dix ans
Il y un an la métropole orléanaise était en pleine opération KGB – pour Kilométrage Global à Bicyclette – une itiniative de l’entreprenant camarade Jan Peire. Soixante-six nostalgiques de l’URSS cyclistes avaient joué le jeu et vous pouvez retrouver le bilan de l’opération sur son blog. Il s’était inspiré du « challenge européen du vélo » (European Cycling Challenge) qui avait lieu chaque année au mois de mai. L’opération avait été initiée par la ville de Bologne en 2012. Visant l’émulation collective, elle mettait en concurrence les grandes villes européennes : il s’agissait de parcourir le plus grand nombre de kilomètres à vélo en l’espace d’un mois1. Deux ans plus tôt, de l’autre côté de l’Atlantique, deux amis de Minneapolis – Patrick Stephenson et Zach Schaap2 – créaient à l’heure des réseaux sociaux le mouvement 30 Days of Biking dans un tout autre esprit. Promouvoir joyeusement le vélo au quotidien sous la forme d’un engagement personnel tout en simplicité.
« A Community of Joyful Cyclists »
« Tout a commencé par un hashtag et un tweet » a raconté Jim Walsh dans un article du MinnPost de 20153. Quelqu’un annonçait sur Twitter l’opération « un mois de yoga » et Patrick Stephenson a répondu du tac au tac sans réfléchir qu’il opterait plutôt pour « un mois de vélo ».
Voilà ce petit morceau d’histoire :
La première année, 300 personnes ont répondu à l’appel et se sont engagées à sortir à vélo chaque jour en avril. 50 personnes se sont même retrouvées pour une sortie collective. Le mouvement était lancé.
Dans leur rafraîchissante Foire aux Questions, les organisateurs expliquent (rétrospectivement) pourquoi avril a été choisi4 :
Chez nous au Minnesota, là où tout a commencé, le mois d’avril est au confluent de toutes les saisons. On peut avoir de la neige, de la pluie, un grand soleil, et tout cela à la fois ! Avril c’est tout à la fois les frimas de l’hiver, le charme de l’été et l’impatience du printemps.
Nous pensons que si vous pouvez pédaler tous les jours en avril, vous pouvez pédaler toute l’année. Rien ne vous arrêtera.
Pour se mettre en jambe, un petit clip sous le soleil du Minnesota (30 Days of Biking de Maria Bartholdi sur Vimeo) :
Dès la seconde édition, cocorico, la France était dans le coup :
Cinq ans après le début du mouvement celui-ci avait des participants dans plus de 100 pays5.
Il n’est donc pas étonnant de trouver pour l’édition 2020 une adaptation du logo – qui s’inspire du nombre 30 en numération romaine – du côté de Brest en Biélorussie :
Pour celles et ceux qui n’imagineraient pas ne pas compter et enregistrer leurs sorties à vélo, il y existe même un club Strava dédié. Mais comme le précise la FAQ précitée, le défi n’a rien d’une compétition. Il n’y a pas de distance minimale à parcourir. On peut même avoir un coup de mou et passer son tour. Bref, si j’étais un mauvais publicitaire je dirais que participer au 30 Days of Biking c’est « zéro contrainte et 100 % plaisir ».
De la simplicité
À la question « pourquoi vous faites du vélo ? », Stephenson répondait en 20136 :
Parce qu’au final on en revient toujours, malgré toute l’agitation, les réseaux sociaux et le militantisme passionné… à vous et votre vélo. Vous avez besoin de vous déplacer, ou vous avez besoin de vous dépenser, et vous utilisez votre vélo. Vous roulez dans votre environnement — bien plus accessible et ouvert puisque vous n’avez pas à vous soucier du carburant ou du stationnement — sur un peu d’acier ou de carbone, peu importe le matériau. C’est facile, c’est efficace, et ça fait du bien.
En 2014, il expliquait également7 :
Nous ne voulons pas que les participants au 30 Days of Biking s’inquiètent de savoir s’ils ont le bon vélo ou si le lycra leur fait de belles fesses. Nous voulons simplement qu’ils sortent et pédalent dans leur quartier. Notre objectif n’est pas tant de rejeter la voiture que de promouvoir le vélo comme une alternative crédible à l’automobile. Nous voulons que vous retrouviez le sentiment que vous aviez enfant lorsque vous faisiez le tour du pâté de maisons, quand votre vélo était votre seul moyen de transport et que vous l’adoriez. Nous voulons que vous vous souveniez de la liberté qu’offre le vélo. Le bonheur, l’indépendance. Ces choses-là n’appartiennent pas au passé et ne disparaissent pas l’âge venant. Elles existent toujours. Et, au final, elles conduisent à une vie plus saine.
Une dixième édition sous le signe du lockdown
En raison de la pandémie, le mois d’avril 2020 a évidemment été particulier partout dans le monde. Les organisateurs ont souhaité maintenir l’événement et ont proposé de remettre ça en septembre, notamment dans l’espoir de pouvoir à nouveau rouler à plusieurs comme avec le Joyful Riders Club :
Si l’application à laquelle j’ai fait appel est fiable, on recense de l’ordre de 3800 tweets (postés par environ 3400 personnes différentes) portant le mot-clic #30daysofbiking le mois passé8.
Je vous en propose une toute petite sélection dans l’ordre chronologique.
À commencer par cette prise de vue saisissante du côté d’un Saint Paul « si tranquille » :
Le même Dan continue son activité en livrant à vélo des jouets. Un circuit de près de 50 km :
De superbes associations casque/masque :
Esther sort en nocturne pour le plaisir avec son enfant pour profiter des « rues désertes » :
Du quaxing au féminin :
Et même un Moulton de sortie – ce qui va faire plaisir à Isabelle :
Pourquoi ne pas en profiter pour chasser le Pokémon ?
La célèbre blogueuse Madi Carlson dont j’ai traduit deux textes (ici et là) participe évidemment au défi comme tous les ans :
Si on est pas présent sur les réseaux sociaux, il est possible de se fabriquer une carte à bloquer entre les rayons (spoke card) :
Là-bas aussi, les cyclistes ont la frite, même à 85 ans :
Katie en profite pour pédaler virtuellement dans le métro où, plaisante-t-elle, des planches ont été obligeamment placées sur les escaliers :
À deux c’est bien aussi :
Ce possesseur d’un élégant Surly, qui se réjouit d’avoir pour la première fois accompli le défi, s’interroge : « Est-ce parce qu’il n’y a pas grand chose d’autre à faire ? »
Spéciale dédicace à Jan Peire l’agent soviétique le ciseleur de haikus pour terminer ce petit tour d’horizon du 30 Days of Biking 2020 avec Todd qui a participé au défi en Brompton et en tweetant à coup de haikus – zeugma.
Tentative d’adaptation :
Crépuscule au trentième jour
Dans le calendrier avril s’achève
Avec la nuit tombée
De mon côté, grâce à la passion française pour la baguette fraîche, et malgré le confinement, je pense que j’ai réussi sans le savoir le défi du tous les jours à vélo en avril.
Et vous ?
Finir par un tête-à-tête
Pour les plus anglophones et anglophiles, une longue interview du bike enthusiast Patrick Stephenson réalisée par Break the Twitch en février 2019 :
Photo de couverture extraite d’un tweet du 31 mars de Soul Strings qui s’est astreint depuis Minsk à produire un tweet illustré par jour après avoir pédalé sur son ММВЗ 111-321 de 1984. Avec son aimable autorisation. Au jour 26 du défi il a même montré qu’on peut participer en oubliant le côté joyful de la chose :
Notes
- En 2016, dans 52 villes de 17 pays, 46 000 participants avaient parcouru 4 millions de kilomètres (voir sur Mobilidoc). Le European Cycling Challenge a semble-t-il disparu sous cette forme après l’édition 2017. En 2019, une nouvelle opération européenne a vu le jour sous le nom Social Biking Challenge.
- Vous pouvez les voir en photo et les entendre au lancement du mouvement le 1er avril 2010 sur MPR News.
- « The man who invented 30 Days of Biking », MinnPost, 13 avril 2015.
- J’écris « rétrospectivement » car en 2010 c’est un printemps particulièrement doux et ensoleillé – « an especially balmy and bright Minneapolis spring » – qui a motivé les deux initiateurs du mouvement.
- « On yer bike: A worldwide movement to pedal for 30 days », Minnesota Public Radio, 1er avril 2020.
- « Moving People to Pedal: Interview with ’30 Days of Biking’ Founder », GearJunkie, 9 avril 2013.
- « 30 Days of Biking », The Growler, 31 mars 2014.
- Il semble qu’il y ait bien plus de posts portant ce hashtag sur Instagram.
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[…] La présentation est dans ce billet (>fr) […]
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