The Arrogance of Space illustré à Besançon par Robert Panier
The Arrogance of Space est un concept proposé en 2012 par l’urbaniste Mikael Colville-Andersen pour décrire les villes qui consacrent une majeure partie de leur espace public à la voiture, qu’elle soit en mouvement ou à l’arrêt1. Il s’agit de donner à voir de manière frappante et immédiatement compréhensible l’hégémonie automobile en milieu urbain2. Des outils ont été mis en ligne pour permettre à qui le souhaite de faire parler les images3.
Il se trouve qu’un tweetos, Robert Panier, a fait au cours du mois de février un bon boulot d’illustration de ce concept dans sa bonne ville de Besançon4.
Il m’a autorisé à réunir et publier ici ses différentes prises de vue et ses commentaires5. Qu’il en soit remercié.
Allez, je me lance, qu’on discute un peu de la place de la voiture à Besançon pour les municipales 2020.
Robert Panier
Suivez le guide !
Chemin du Fort de Bregille
750m de l’hypercentre. Bandes bleues impraticables à pied. Vitesse ? 50 !
Ici, impossible de maintenir deux sens de circulation sans exclure les piétons.
Rue Bruand
Juste derrière la gare, haut lieux l’intermodalité à Besançon :
❌ fauteuil non 👨🦽
❌ enfants non 🚸
❌ caddie/poussette non !
Les autres, merci de descendre sur la chaussée à 50 km/h pour passer le pylône ou vous croiser.
Heureusement un parking supplémentaire est prévu !
Rue Larmet
Quand t’as pas la place pour un trottoir, mais que tu trouves la place pour deux voies de circulation + du parking en bataille.
Ne changeons rien !
Rue Thiémante
Une très jolie petite ruelle en zone de rencontre.
Zone de rencontre sans aucun espace piéton. Je dirais 100% bagnole si ce n’était pour ce – très mince – double sens cyclable. Bel effort !
Rue des vieilles pierrières
Quand t’as pas la place pour un trottoir utilisable, mais que t’as la place pour du stationnement.
Y’a pas une école dans cette rue ? Ah tiens, si.
Rue Renan
Quand t’as pas la place pour un trottoir utilisable, mais que tu trouves la place pour du stationnement.
Ici en prime la ville de Besançon fait du stationnement sur un trottoir déjà minuscule pour envoyer les bons signaux aux #gcum.
Cité Parc des Chaprais
Deux sens de circulation auto + du stationnement + encore du stationnement + des garages. Je vous laisse apprécier le trottoir. Il n’y a sans doute pas la place pour faire bien.
Jacques Prévert
Jacques Prévert aurait sans doute adoré voir son nom associé à cette rue surréaliste ! Chacun a au moins un garage + une allée. Pas de portillons, la seule interface avec le monde, c’est le porche à bagnole.
Besançon offre du parking en rab.
L’espace vert c’est un rond-point.
Rue de Belfort
Ma rue. Le pire c’est que je l’aime cette rue.
Elle ne nous aime visiblement pas en retour, nous autres piétons, cyclistes et riverains. Elle aime surtout la voiture.
Rue de Trépillot
Quand t’as pas la place pour faire un trottoir, mais que t’as la place pour deux voies de circulation.
Rue Proudhon
Deux voies de circulation automobile dans le même sens.
Ici rue « semi-piétonne » ça veut dire deux fois moins d’espace pour les piétons que pour les voitures ? ou quatre fois moins, je ne comprends plus ?
Bon, poussez-vous les gosses, y’en a qui bossent là et qui se déplacent pour de vrai !
Chemin Français
Récemment refait sans aucun aménagement cyclable, ni trottoir aux normes ; en dépit de la loi et du respect élémentaire dû aux usagers. Sans doute n’y avait-il pas de place.
Le stationnement en revanche, ça passe crème !
Rue Eugène Savoie
Les priorités de la voirie à Besançon : d’abord une voie 🚗, puis une deuxième voie 🚗, enfin du stationnement 🚗.
Avec ce qu’il reste on fait ce qu’on peut pour les piétons et les vélo. Ah, zut, il reste rien ? Tant pis ! 🚷 🚳
Boulevard Léon Blum
Dans cette série on a vu les petites rues – pas toujours si petites – sans trottoir. Maintenant, les grand axes de Besançon. J’ai pas voulu me mettre au milieu du boulevard avec mon appareil photo, alors on prend de la hauteur.
Le premier qui trouve l’aménagement vélo a gagné !
Rue Richebourg
Fallait-il mettre du bleu sur les zones latérales ? Ici, on ne peut vraiment pas parler d’espace dédié aux piétons, la marche y est impossible. On notera qu’avec la pente, les voitures roulent vite.
Avec l’angle et le stationnement, la visibilité est nulle.
Rue Gabriel Plançon
Quand t’as toujours pas la place pour un trottoir mais que t’as la place pour deux voies de circulation auto.
Route de Dole
La bucolique route de Dole ! (en pleine ville, hein !)
Partage de la voirie un peu déséquilibré ?
Rassurez vous, Besançon prévoit une voie de circulation automobile supplémentaire. Bientôt, bientôt !
Route de Marchaux
Vous vouliez aller au bowling de Palente à pied ? Marcher depuis le tram ?
Désolé, cette option n’est pas disponible.
Rue Gérard Mantion
Le nouvel urbanisme des années 2010, conscient des enjeux de la mobilité durable.
16 m de parking bordé de deux voies de 6 m, une de chaque côté.
28 m bagnole, 4 m piéton, rien pour le vélo.
Rue de Belfort
Une de mes préférées dans la série des rues sans trottoir.
À vélo, passage (en côte) obligatoire pour remonter la rue de Belfort (plate).
Rue étroite, et des 🚗 prêt.e.s à tuer pour pouvoir monter cette rue en 3ème.
Avenue Gaulard
L’avenue Gaulard, dans la boucle du Doubs, au bord du cœur historique de Besançon. Featuring la bande cyclable la plus dangereuse et la plus inutile de Franche Comté, entre le couloir à bagnoles et les voitures en marche arrière.
Le petit trottoir dans ce beau couloir vroum vroum. Ce gros tuyau à voitures est une belle redondance avec le boulevard Droz. Comme ça coince au bout : pas plus efficace.
Mais là où ça devient vraiment cocasse, c’est vu du dessus.
Notes
- Mikael Colville-Andersen, « The Arrogance of Space », 21 novembre 2019.
- Voir par exemple ce fil Twitter initié par Mathieu Chassignet.
- Démarche expliquée ici ou encore là.
- On peut relever incidemment que Besançon est parfaitement comparable à Orléans puisque ces deux villes comptent chacune environ 116000 habitants.
- Les tweets qui ont donné matière ce billet ont été compilés par ses soins dans ce fil.
Triste mais éloquent. Reproductible à l’infini dans des milliers de villes de France.
Je me faisais la même réflexion ce midi rue des Grands Champs (à Orléans), rénovée il y a pas si longtemps, et où, par endroits, on a privilégié le stationnement des bagnoles au détriment du cheminement des piétons, impossible car réduit à sa portion congrue, ou alors qui « serait » possible si les autos ne serraient pas au maximum les habitations pour empêcher leurs congénères de passage de se frotter à elles.
Voir ici : https://www.google.com/maps/@47.9048639,1.8998181,3a,75y,202.85h,73.28t/data=!3m6!1e1!3m4!1s8wJI02iQmT8qWJlO78hcsw!2e0!7i13312!8i6656
(L’automobiliste dira que le piéton-pas-content n’a qu’à aller sur le trottoir d’en face mais bon…)
Dommage, autant d’occasions manquées d’inverser les symboles…
Il y aura bientôt deux ans vous aviez posté un long et remarquable commentaire dans le billet où j’explorais cette rue des Grands Champs new look. 🙂
Pour mémoire :
Très très belles réalisations.
Je vais dans le sens de V-LO, reproductible, malheureusement, et courant à Orléans où les opération de « recalibrage de la voirie » n’ont toujours été faites que contre les piétons, quartier St Marc par exemple, rue des pensées dernièrement.
JPB
Bon travail de Robert à Besançon. Etonnant tout de même de faire ce constat à Besançon qui claironne facilement son excellence environnementale et n’est pas si mal classée au Baromètre des villes cyclables.
De quoi inspirer plein d’autres associations. Mais on voit que, globalement, « c’est du lourd » car c’est toute une logique à inverser : traiement prioritaire aux piétons et aux vélos, sans oublier les personnes handicapées. Ce doit être un chantier permanent. Combien de temps est-il nécessaire pour approcher d’une situation satisfaisante ? 10 ans ? C’est sans doute proportionnel à la taille de la ville. Mais les travaux de voirie coûtent cher dès lors qu’il s’agit de refaire, sans oublier que les dotations de l’Etat ont fortement diminué, d’où un réel laisser-aller sur la voirie comme d’ailleurs, souvent, sur les équipements publics. D’autant qu’en ce domaine, le point sans doute principal est la réorganisation du stationnement : il faut se méfier de ces opérations qui délogent les voitures garées : on les sort par la porte mais elles reviennent par la fenêtre (avec du stationnement encore plus illicite).
Un tout petit peu plus de réponses au baromètre de la FUB à Orléans et des notes globales proches :
– Besançon : 3,01
– Orléans : 2,97
Concernant Orléans, le stationnement est délogé à dose homéopathique.