Des maires d’Orléans Métropole n’ont pas encore cherché l’interrupteur

Les réglements sont-ils faits pour ne pas être respectés ? Cette interrogation, même pas digne d’un bac de philo, a trouvé un énième écho à Orléans avec l’affaire dite de la rue de la gare. Dans cette rue envahie par la première de ligne de tram à l’orée des années 2000, les riverains ont pris la longue habitude de stationner sur le trottoir. Or v’là-t’y pas que la mairie aurait décidé de s’attaquer au problème comme le quotidien local l’a rapporté1. Bon, on verra bien comment se dénouera cette affaire tout à fait digne du mot-clé OrléansVilleParking mais au moins a-t-elle le mérite d’introduire mon propos sur un autre réglement – moins universel que ce bon vieux Code de la route – à savoir le réglement local de publicité métropolitain (RLPm). Avant de poursuivre, je dois confesser que s’il y a une chose qui m’horripile autant qu’une voiture stationnée sur un trottoir, c’est un panneau publicitaire dans mon champ de vision. A fortiori quand il est lumineux et agité.

RLPm mon amour

Notre réglement local de publicité métropolitain a été adopté le 11 février 20212. Le site Service-Public.fr qui consacre une page au RLP explique que ce document « permet d’adapter localement certains points de la réglementation nationale applicable aux publicités, enseignes et préenseignes » et précise :

Lorsqu’un nouveau règlement local de publicité entre en vigueur, tous les dispositifs existants (publicités, enseignes, préenseignes) doivent être mis en conformité dans un délai de 2 ans à compter de cette entrée en vigueur.

C’est pourquoi on a eu des échos des effets de ce nouveau réglement dans le quotidien local en mai 2023 sous le titre « Les panneaux publicitaires sont en train de disparaître ou de rétrécir dans la métropole d’Orléans »3 et que Serge Grouard a pu faire une opération de communication sur le sujet en janvier 2024 sur le mode je m’attaque à la pollution visuelle avec détermination4.

Dans l’article de 2023 on apprenait notamment :

Le temps de la négociation n’est pas complètement le même avec les particuliers. Plus compliqué. « On ne s’est pas fait que des amis. Pour certains, ces panneaux étaient une rente », concède la maire de Saran, Maryvonne Hautin.

En bordure de la RD2020 ou encore de la RD2152 entre La Chapelle-Saint-Mesmin et Saint-Jean-de-la-Ruelle, la présence des panneaux dans les pelouses des particuliers s’apparente à un jackpot.

Sur les axes extrêmement empruntés, chaque support dans l’agglomération d’Orléans peut rapporter entre 5.000 et 8.000 euros par an. Un Saranais en disposait d’une… douzaine sur ses terrains.

Il y a un hic. Si à Saran le problème a peut-être été réglé avec une poigne toute communiste5, à La Chapelle et à Saint-Jean-de-la-Ruelle, la question des grands panneaux numériques n’a tout simplement pas été abordée !

En témoignent ces captures de Street View le long de la tangentielle pour ce qui concerne Saint-Jean-de-la-Ruelle, et au-dessus de l’A71 à La Chapelle, où ces dispositifs ridiculement énergivores continuent de trôner :

Les maires de ces communes auraient-ils préféré ne point se fâcher avec certains de leurs administrés adeptes d’une rente devenue indue ? Un peu comme avec le stationnement sur trottoir ? pourriez-vous me dire.

Je subodore que c’est le cas ailleurs sur le territoire métropolitain. Or cela contrevient totalement aux prescriptions du RLPm. Je ne vais pas me lancer dans une démonstration fastidieuse mais grosso modo la publicité numérique est interdite le long de ce que le réglement appelle des « axes à protéger », et cette zone est même de 200 m de large en ce qui concerne la tangentielle comme le montre cet extrait du zonage de Saint-Jean-de-la-Ruelle :

En hachuré noir la zone de « protection » de la tangentielle (en rose) dans le sud
stéoruellan.
J’ai positionné les points rouges là où se trouvent deux écrans numériques publicitaires géants (Champs-Frais et Paul-Bert).

Il existe la possibilité de déléguer à la présidence de la métropole le pouvoir de police en matière de publicité. Hélas, comme avec le pouvoir de police en matière de circulation, les maires des 22 communes ont décidé de ne pas déléguer ce pouvoir. Et cela va même plus loin si l’en croit le journaliste de La Rép’ qui a couvert l’opération de communication de Serge Grouard au début de l’année puisqu’il écrivait :

Précisons que si la Métropole a son règlement local de publicité (RLPm), qui réduit le nombre de panneaux publicitaires, il revient en dernier lieu aux maires de faire le choix de les supprimer définitivement, ou non. Les communes conservent donc leur libre arbitre en la matière […]

Il n’a pas sorti ça de son chapeau, on a dû lui glisser cette fausse information.
Le RPLm est clair, ses prescriptions sont limpides. Il n’est nulle part question de « libre arbitre » (sic !).
Encore faut-il avoir le courage politique d’appliquer les réglements que l’on a votés.

Alors je pose la question : est-ce trop demander aux élu(e)s en poste de nous débarrasser vraiment de cette authentique pollution visuelle ?


Crédit photo de couverture : © Nevit Dilmen, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

Notes

  1. Dimitri Crozet, « Finie la tolérance pour le stationnement sur trottoir, rue de la Gare à Orléans ? Un collectif de riverains proteste », La République du Centre, 24 septembre 2024.
  2. Toutes les pièces de notre RPLm sont consultables en ligne.
  3. Nicolas Da Cunha, « Les panneaux publicitaires sont en train de disparaître ou de rétrécir dans la métropole d’Orléans », La République du Centre, 10 mai 2023.
  4. Cette opération a été couverte pour La Rép’ par David Creff sous le titre « Pourquoi la Ville d’Orléans veut-elle la peau des panneaux publicitaires géants sur son territoire ? » (17 janvier 2024), et pour France Bleu Orléans par Camille Huppenoire sous le titre « La Ville d’Orléans poursuit sa chasse aux grands panneaux publicitaires » (17 janvier 2024).
  5. Je n’ai pas été vérifier. Contres-exemples éventuels bienvenus.

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5 réponses

  1. Abandon dit :

    Non, ils veulent plus de budget pour financer les routes ;(

  2. Le directeur de cabinet du maire de Saran a réagi sur X à ce billet :

    « Quelques irréductibles à Saran pour lesquels les procédures d’application du règlement sont en cours. Notamment le panneau numérique sur le RD2020 a Saran. Si un panneau est encore debout, cela ne veut pas dire que la mairie ne fait rien, un contentieux peut aussi être en cours. Ce panneau était déjà implanté sans autorisation au départ, et pour lequel l’entreprise a attaqué le RLP de Saran puis le RLPm de la métropole. »

    Si je ne me trompe, ce panneau se trouve au niveau du garage Speedy après le giratoire des crocus quand on va vers le nord :

    Panneau numérique illégal à Saran le long de la RD2020

    • Panneau situé en « ZP4a – Axes urbains structurants ».

      Extrait du réglement pour cette zone :

      Dispositifs scellés ou posés au sol (hors mobilier urbain) :
      La publicité au sol est autorisée en respectant une surface totale maximale de 10,5m² et une
      superficie utile maximale de 8m².

      Il me semble donc que le panneau est dans les clous, hélas.

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