Restauration moderne d’un vélo BSA cinquantenaire — par Pedal and Tring Tring
Un vélo vintage c’est chouette. Un vélo vintage en bon état de marche c’est encore mieux. Vijay Malhotra, qui anime le blog « Pedal and Tring Tring » depuis Bombay, a fait restaurer un vieux vélo produit par la Birmingham Small Arms Company (BSA) à l’époque où l’industrie du cycle avait fini de vivre son âge d’or. D’ailleurs cette entreprise britannique fondée en 1861 a disparu en 1973. Notre encyclopédie préférée nous apprend également que sa branche vélo avait été « vendue à Raleigh en 1957 » et que Raleigh avait continué « la production dans les ateliers de BSA jusque dans les années 1960. »
Le vélo présenté ici est donc peut-être un Raleigh, qui sait ? Vous me direz, ce n’est pas le plus important dans l’histoire1 !
Voici la traduction de « A 50-year-old bsa roadster gets restored to it’s former glory with a modern finish » publié le 5 novembre 2021 sur Pedal and Tring Tring. Avec l’aimable autorisation de l’auteur.
En décembre 2020, j’étais à la recherche d’un mécanicien cycle expert qui pourrait s’occuper de la restauration d’un vélo BSA roadster2 vieux de plus de 50 ans que j’avais acquis auprès d’un vieux vélotaffeur de Mumbai (Bombay).
Après un long compagnonnage avec son propriétaire, et de nombreux kilomètres parcourus sur des routes qui ont changé de revêtement au fil des décennies, la bicyclette était presque à la retraite au moment de changer de mains.
Cet engin témoigne d’un changement majeur dans l’environnement socio-politique des villes – des hommes en dhoti, kurta et turban conduisant une charrette à bœufs – aux hommes en lycra, lunettes de soleil, vélos en carbone haut de gamme et voitures de luxe.
Son précédent propriétaire avait effectué de nombreuses modifications lors de son entretien, notamment le changement des garde-boue d’origine, du porte-bagages, du pédalier, du protège-chaîne, des moyeux, de la béquille, des jantes, de la sonnette et, bien évidemment, des pneus, des chambres à air et des plaquettes de frein.
Le cadre de chez BSA qui a survécu était à l’origine de couleur vert militaire et avait subi un certain nombre de traitements de peinture noire des mains mêmes du propriétaire. Il suivait une politique d’entretien minimal et estimait que « seule une teinte neutre comme le noir permettrait à sa bicyclette de rester discrète et à l’abri des regards malveillants lorsqu’elle se trouvait dans l’espace public ».
Dans les années soixante et soixante-dix, lorsque le rythme de vie à Mumbai était lent, les gens exécutaient eux-mêmes des tâches techniques ne nécessitant que peu de compétences afin de régler des problèmes basiques. M. Glen Falcon, le premier propriétaire de ce BSA roadster, se souvient de plusieurs cas où il s’est impliqué dans la réparation de soucis mineurs sur son vélo.
Outre le cadre, la fourche, le jeu de direction, le guidon, la tige de selle, les poignées, le jeu de freins et la pompe à air fabriquée par la Birmingham Small Arms Company étaient d’origine.
Lorsque la bicyclette est arrivée chez moi, après une inspection minutieuse, elle était couverte de rouille, les pneus étaient à plat, la chaîne était couverte de rouille et de nombreux composants étaient corrodés et devaient être récupérés ou remplacés.
J’ai contacté Faisal Thakur, ancien champion national de BMX et passionné de vélos, qui possède les connaissances et les capacités requises et qui a fait ses preuves dans la création de vélos personnalisés et la gestion de projets de restauration.
Par-dessus tout, Faisal étant une pointure dans ce domaine, il sait de quoi il retourne et comment procéder avec des bicyclettes anciennes, ce qui était un critère majeur pour s’occuper de mon cas. Ayant totalement confiance dans ses compétences, je lui ai confié ce projet.
Faisal expose les aspects techniques du processus de restauration :
Tout a commencé par un appel téléphonique de Vijay qui m’a confié qu’il souhaitait faire remettre en état une bicyclette ancienne. Je savais que Vijay cherchait à en acheter une depuis longtemps, mais lorsque je tenais un magasin je n’avais pas pu répondre à sa demande. Et quand il a dit qu’il essayait de trouver un mécanicien, j’ai répondu que c’était dans mes cordes et qu’en raison de la pandémie j’avais un peu de temps pour moi. J’ai décidé de l’investir dans ce projet.
Personnellement, je savais que cela allait demander beaucoup d’efforts, mais j’aime bien travailler sur des projets créatifs. Et puis quand Vijay a amené le vélo, j’ai réalisé qu’il y avait beaucoup de travail par rapport à ce que j’avais prévu en regardant les photos, argh !
En fait, le vélo avait des composants qui avaient simplement besoin d’être remis en état avec passion, plutôt que d’être simplement remplacés. J’ai donc commencé à le démonter, et l’ouverture de certaines pièces s’est avérée fastidieuse car elles étaient rouillées et semblaient être restées en place pendant plusieurs décennies.
Je les ai aspergées de WD40 et je les ai laissées ainsi toute la nuit pour débloquer les boulons. Pour sécuriser les pièces, j’ai même appliqué de l’huile d’olive afin de pouvoir les ouvrir sans aucun dommage. Au fur et à mesure que je retirais les pièces et que je triais les composants, je devais planifier et répartir l’externalisation de travaux spécialisés tels que la peinture du cadre, le briefing du spécialiste du chromage, la recherche de composants auprès des fournisseurs, etc.
Au cours de ce processus, j’ai également compris qu’il ne serait pas vraiment judicieux de restaurer le vélo dans son état d’origine ; l’utilisation de pièces en acier inoxydable était préférable ainsi que l’emploi de vis à tête hexagonales pour permettre à n’importe qui d’intervenir facilement sur le vélo avec des clés Allen.
Du côté des détails, lorsque j’ai commencé le travail il y a eu des moments où j’ai senti que telle vis n’avait pas la bonne forme – entre une vis Allen à tête ronde ou une à tête conique, je devais choisir la plus adaptée. La longueur variait, et j’ai dû utiliser des écrous de serrage de différentes tailles et que la vis ne ressorte pas. Je devais obtenir les bonnes longueurs de vis – il pouvait y avoir une différence de 2 ou 3 mm, etc., mais j’ai pensé qu’en soignant ces détails, l’aspect final serait meilleur, et c’est ainsi que j’ai procédé, fixation après fixation.
Ensuite, j’ai pensé qu’un porte-bagage et une béquille en acier inoxydable feraient une grande différence par rapport à des composants standards. J’ai pris contact avec un fabricant qui n’avait jamais fait quelque chose de ce genre auparavant, mais qui était prêt à le faire. Pour lui, c’était un défi mais il y est parvenu. J’ai dû me rendre trois fois dans son atelier pour m’assurer que le cahier des charges était respecté et, une fois le projet terminé, il était très beau.
Il y a eu quelques problèmes techniques sur lesquels j’ai dû travailler. Par exemple, j’ai dû découper l’écrou pour libérer la tige de selle car elle ne sortait pas après plusieurs tentatives. Pour éviter que les écrous des rayons ne rouillent, ils ont été anodisés pour améliorer leur longévité, et ainsi de suite.
Ensuite j’ai dû remonter toutes les pièces en m’assurant de n’en oublier aucune avant d’externaliser le travail de chromage, car je n’avais pas le droit à l’erreur. Les ouvriers chargés du chromage ne saisissent généralement pas la valeur des vieux objets, car ils sont plus intéressés par les travaux industriels standards. J’ai donc dû les surveiller et les convaincre de livrer le produit tel que je l’avais prévu – avec précision et dans les délais. J’ai même partagé mes connaissances avec l’ouvrier en lui expliquant « pourquoi on fait ça et la destination des pièces » afin qu’il travaille avec intérêt et produise un résultat de qualité.
J’avais l’intention d’utiliser des pneus blancs, mais en raison de la pandémie en cours et de la forte demande, ils sont en rupture de stock. J’ai donc opté pour des pneus normaux, mais plus légers, dans le but de rendre le vélo aussi léger que possible.
Les roues précédentes étaient destinées à supporter des conditions difficiles lourds et à porter des charges, mais je savais que Vijay n’utiliserait pas le vélo pour autre chose que des déplacements quotidiens ou de loisir, c’est pourquoi j’ai décidé d’opter pour des roues et des pneus légers. Ainsi, le poids total de la bicyclette a bien diminué.
Sur le plan esthétique, j’ai utilisé des combinaisons de couleurs sur certaines parties afin d’atténuer l’effet des parties chromée, tout en conservant l’identité classique de l’engin. Le cintre a été peint en noir pour se marier avec la selle et les poignées noires, et former une ligne supérieure monoton ce va bien avec l’esthétique du cadre peint en vert militaire mat. Les garde-boue, le garde-chaîne, le porte-bagages et la béquille sont en finition chromée.
La réaction de Glen après avoir vu le vélo restauré :
« Je suis réellement impressionné par le travail et l’amour avec lesquels le roadster a été restauré. Faisal a certainement de l’or dans les mains et je voudrais le féliciter pour avoir pris la peine de faire revivre ce vélo ».
Mon sentiment :
« Je suis super heureux du résultat et j’ai hâte de rouler sur ce chef-d’œuvre vintage« .
Notes
- En revanche, concernant l’Histoire avec un grand H, on peut signaler que pendant la Seconde Guerre mondiale, c’est BSA qui a fourni aux troupes britanniques et du Commonwealth un vélo pliant destiné aux parachutistes et autres commandos qui a notamment été utilisé lors du débarquement de Normandie. Un article richement illustré sur le sujet.
- L’article roadster de notre encyclopédie préférée en langue anglaise renvoie en français sur vélo hollandais.