Avenue Dauphine : Serge Grouard affiche à nouveau son absence d’ambition pour le vélo à Orléans

On connaît la blague déjà ancienne de Coluche sur les technocrates : « si on leur donnait le Sahara, dans 5 ans, faudrait qu’ils achètent du sable ailleurs. »¹ On pourrait l’adapter aux élus de la majorité municipale orléanaise : « si on leur donnait une ligne droite, ils finiraient par créer une déviation. » C’est ce qu’on peut retenir de la réunion publique qui s’est tenue hier concernant l’avenir de l’avenue Dauphine. Exit le tout droit en site propre à vélo, bienvenue au détour au milieu des bagnoles ! Ce n’est finalement pas l’avenue Dauphine qui va être aménagée mais les abords de la rue Saint-Marceau qui vont être bricolés… Tout ça pour ça !

Acte I : prendre la température

31 mars 2025 : réunion publique à la salle de la cigogne à Saint-Marceau. Affluence monstre, tout le monde ne peut pas entrer dans la salle – dont votre serviteur. Grosse mobilisation de la cyclosphère locale. Je dénombre 100 vélos accrochés un peu partout dans les environs de la salle.

Quatre scénarios concernant l’avenue Dauphine sont présentés. Foire d’empoigne entre les pro et les anti-vélos. Promesse d’une autre réunion publique à venir et d’une autre hypothèse à creuser : « l’alternative d’un troisième scénario rue Saint-Marceau, couplée avec une rue scolaire »². Je me souviens très bien avoir entendu Serge Grouard dire en début de réunion – après avoir présenté les quatre scénarios – en s’adressant à l’assistance : « qu’est-ce que vous voulez, vous ? » Le fameux clientélisme au ras des places de stationnement qui réactive à chaque fois le même psychodrame collectif dès lors qu’il est question de transformer la ville au bénéfice des mobilités actives. Certains riverains-automobilistes sont au bord de l’apoplexie et des commerçants se voient déjà un pied dans la tombe.

Acte II : jeter le thermomètre

23 juin 2025 : réunion publique au gymnase Pellé à Saint-Marceau. La mairie a prévu les barrières Vauban pour accrocher les vélos à l’extérieur et beaucoup de chaises à l’intérieur. Affluence moins importante mais néanmoins importante³.

Serge Grouard rejoue la même partition que précédemment – clientélisme pro-riverain alors qu’en théorie on est sur un projet métropolitain ! – et certains dans l’assistance n’ont manifestement pas compris qu’ils n’avaient plus à s’inquiéter du scénario de mise en sens unique de l’avenue Dauphine au bénéfice des vélos, dans la continuité du pont George-V. De « sécuriser les cyclistes avenue Dauphine », titre de la première diapo projetée fin mars, on est passé à « partage de l’espace public au sud du pont George-V ». La messe est dite et la (seule) intervention du VP à la politique cyclable en mode prêche de curé pour dire qu’il faut se respecter les uns les autres finit d’enterrer toute ambition. Et malgré ce recul, Serge Grouard ose pousser le bouchon encore plus loin en invitant les cyclistes à emprunter l’itinéraire présenté, pour « jouer le jeu ». Ben voyons, on connaît déjà le résultat comme l’a souligné le camarade Yann à Ici Orléans⁴ :

« Les cyclistes comme les piétons vont toujours au chemin le plus court et donc personne ne passera par la rue Saint-Marceau. Résultat : les cyclistes seront toujours en danger sur l’avenue Dauphine. »

Si dès le départ, il avait réellement eu l’ambition de faire quelque chose de sérieux⁵, il aurait proposé une expérimentation de la mise en sens unique de l’avenue Dauphine, à l’image de ce qu’Olivier Carré avait fait en 2020 pour le pont George-V notamment ⁶. À l’époque, nous étions déjà dans la campagne des municipales, c’était audacieux de sa part. Pas le genre de prise de risque qu’affectionne le maire actuel à moins d’un an des prochaines élections (mars 2026).

Le 29 juin 2020, je publiais « Municipales 2020 à Orléans : Serge Grouard s’installe derrière le volant » où transparaissait une certaine inquiétude, notamment à l’égard des aménagements temporaires de l’ère Carré. Si le maire actuel n’a pas osé revenir dessus, il s’est bien gardé de proposer quoi que ce soit de nouveau en matière de vélo, laissant Orléans se faire distancer sur ce point par de nombreuses villes françaises. Et ça commence à sérieusement se voir.

Est-ce qu’en juin 2026, la perspective d’un cinquième mandat d’immobilisme grouardien ne sera plus qu’un vieux rêve de concessionnaire ?

Bonus

Pour se consoler d’autant de médiocrité, rien de tel qu’écouter Paul Simon interpréter en live la magnifique chanson Homeward Bound sur le plateau d’une émission de télé étatsunienne en 1975 :

1. À voir en contexte dans la vidéo de cet excellent sketch.
2. Bon compte-rendu de Blandine Lamorisse dans La République du Centre : « Projet de réaménagement de l’avenue Dauphine : la Métropole a présenté ses quatre scénarios devant une salle archicomble », 1er avril 2025.
3. Nicolas Da Cunha pour La République du Centre l’estime à 200 personnes dans son compte-rendu : « Aménagement de l’avenue Dauphine à Orléans : ce n’était pas vraiment le scénario envisagé… », 23 juin 2025.
4. Patricia Pourrez, « Orléans : il n’y aura finalement pas d’aménagement cyclable sur l’avenue Dauphine, l’association de Dammo dépitée », Ici Orléans, 24 juin 2025.
5. C’est-à-dire lisible, sécurisé et confortable.
6. Marie Guibal, « Voici les aménagements cyclables (et piétons) provisoires qui arrivent dans la métropole d’Orléans », La République du Centre, 12 mai 2020.