L’extension du stationnement payant à Orléans « ville parking » n’aura pas lieu

Il y a huit mois j’évoquais pour la première fois ici Orléans « ville parking ». Il est temps d’y revenir puisque en octobre dernier, un questionnaire concernant un « projet d’extension du périmètre du stationnement payant sur voirie » a fait son apparition. En version papier il a – semble-t-il – été distribué dans les boites aux lettres des habitants des rues concernées. En version Web, il a été accessible sur la plateforme participons.orleans-metropole.fr sur cette page. Et c’est pas moins de 859 réponses qui ont été enregistrées par ce biais, ce qui est énorme ! Je serais curieux de prendre connaissance du verbatim de ces réponses1. J’imagine que les commentaires laissés par les signataires d’une pétition lancée par une habitante du quartier Dunois contre cette proposition2 en donnent un aperçu3. Le suspens orchestré par la mairie autour de la décision qui serait prise4 n’a pas duré aussi longtemps que prévu puisque Serge Grouard n’a pas résisté au plaisir d’annoncer lui-même aujourd’hui – la mine satisfaite – lors du forum des quartiers ouest, à la fin d’une interminable prise de parole devant une maigre assemblée gérontocrate, qu’il n’y aura pas d’extension du stationnement payant5. Il faut croire qu’il ne cherche pas à « améliorer le quotidien des habitants » puisque c’était l’objectif annoncé de cette mesure.

Savoir compter

Plus tôt dans le mois j’ai ironisé sur le résultat, prévisible, d’une telle consultation populaire sur un réseau social qu’il est désormais tendance de snober.

Je me suis donc trompé dans les grandes largeurs puisque d’après le maire, environ 20 % des répondants étaient favorables à la mesure (73 % contre). Il faut dire qu’à dix euros par mois, c’était cadeau pour bénéficier à coup sûr de meilleures conditions de stationnement au quotidien. Les plus malins l’ont certainement compris.

Au-delà du clientélisme bagnolard le plus basique qui peut à lui seul expliquer cette reculade, on peut également se demander si la mairie ne sentait pas venir une difficulté de mise en œuvre. Au-delà des moyens supplémentaires à déployer pour contrôler effectivement ces nouveaux secteurs, il allait se poser un problème de taille : quid du stationnement illicite endémique dans certaines rues (et pas uniquement la nuit) ? Est-ce que le paiement de l’abonnement résident allait devenir un blanc-seing pour continuer de pratiquer le gcum dans la logique du « j’ai payé, faites pas chier » ?

« On ne sort de l’ambiguïté qu’à ses dépens » aurait écrit le cardinal de Retz. Mieux vaut donc, dans la logique grouardienne, continuer à ne pas voir les voitures garées sur les trottoirs, c’est plus sûr !

Petit retour en arrière

En 2022, au cours du même événement (le forum des quartiers ouest), tout un stand était consacré à cette question épineuse du stationnement dans les quartiers de « la première ceinture » autour de l’hypercentre. À cette occasion, j’avais rapidement (mal) pris des photos avec mon téléphone – que mes lecteurs me pardonnent ces clichés de guinguois.

D’abord un rappel utile sur les enjeux :

Ensuite un exemple parlant :

On poursuit sur les constats, secteurs par secteurs :

Le problème ne se pose pas que la nuit et certains secteurs sont littéralement saturés :

Quand le stationnement payant est devenu la règle dans l’hypercentre, le 1er mars 2016 sous l’ère Carré qui, lui, n’avait pas calé devant une bronca autrement plus importante6, il n’a pas fallu longtemps pour constater un report du stationnement dans les quartiers restés « gratuits », ce qui était encore là aussi tout à fait prévisible.

Je cite l’article de La Rép’ publié à l’époque7 :

Les emplacements, par centaines, demeurent vides. Où sont donc passées les voitures ? « Nous avions entre un tiers et un quart de voitures ventouses, elles ont disparu, se réjouit le député-maire Olivier Carré (LR). 50 % des places sont aujourd’hui occupées. Il y a 10 à 15 % des voitures qui ne stationnent plus là. Elles vont ailleurs. » Ailleurs, comme dans les parcs de stationnement d’Orléans Gestion, encore que beaucoup d’automobilistes optent pour les transports en commun.

Mais ailleurs, ce sont aussi et même surtout, les secteurs périphériques du cœur de ville.

[…]

Des changements d’habitude ont donc accompagné, ces dernières semaines, les déplacements des habitants de l’agglomération. « Au début, cette décision n’était pas populaire, je l’assume, concède Olivier Carré. Ensuite, tout le monde a trouvé son équilibre. »

En particulier, les riverains, qui ne perdent plus la moindre minute à tourner sur les boulevards pour y trouver des places de stationnement. Elles les attendent.

Un certain équilibre a été trouvé dans l’hypercentre mais le déséquilibre perdure et s’aggrave dans les quartiers périphériques.

Résumons : les études ont été réalisées, les services ont bossé sur la mesure à prendre mais la majorité actuelle préfère ne rien faire, même à prix cassé (10 € l’abonnement résident dans la proposition contre 21 € actuellement dans l’intramail).

La ville en transition reste introuvable.

Le coin des sociologues

Courant septembre, j’ai lu un essai des sociologues Hervé Marchal et Jean-Marc Stébé intitulé Le pavillon, une passion française publié aux PUF en début d’année8. Livre instructif qui contient un encart sur la voiture dont je tiens à vous faire profiter – en espérant que les auteurs et l’éditeur ne m’en tiennent pas rigueur :

Les camarades ont du talent

Il y a environ un mois, Trololovélo a publié une remarquable vidéo inspirée d’un vrai-faux voyage d’étude aux Pays-Bas. Ce n’est pas directement lié à la problématique du stationnement mais c’est instructif en soi sur une autre problématique sur laquelle la majorité municipale ne souhaite surtout pas s’impliquer (au-delà de simples déclarations d’intention) :

Notes

  1. Pour faire bonne mesure, voilà celui que j’ai laissé : « Encore une fois, la mairie trouve pertinent de n’interroger que les riverains ou les « professionnels » directement concernés. C’est bien dommage car il s’agit de politique publique, et celle-ci intéresse tous les administrés. Il se trouve que si je ne réside pas ou n’exerce pas d’activité professionnelle dans les rues concernées, je circule régulièrement dans nombre de ces rues (à pied ou à vélo) et l’ampleur de la problématique « stationnement des véhicules motorisés » saute aux yeux avec son cortège de stationnement sauvage ou indu (zone bleue ou place livraison squattées en permanence). Donc toute politique qui tente de réguler efficacement le stationnement sur voirie est la bienvenue même si on peut regretter le caractère trop modeste du prix de l’abonnement annoncé. Il n’y a aucune raison objective pour que les riverains et professionnels paient deux à trois fois moins cher que dans l’intramail. L’espace public dans ces quartiers pas du tout périphériques n’est pas moins précieux que dans l’hypercentre de notre ville. »
  2. Nicolas Da Cunha, « Et si le stationnement dans trois quartiers d’Orléans, jusqu’alors gratuit, devenait payant ? », La République du Centre, 4 novembre 2023.
  3. Extrait de l’argumentaire de la pétition : « Nous voulons conserver le stationnement libre et gratuit dans notre quartier Dunois, et permettre aux professionnels qui y exercent de continuer à recevoir leur clientèle. Nous payons assez d’impôts comme cela dans nos quartiers. Ce projet augmentera le coût de la vie pour ceux qui habitent et travaillent ici, sans offrir d’avantages tangibles en retour. » (c’est moi qui souligne)
  4. Philippe Cros, « Stationnement payant dans les quartiers Dunois, Gare et Saint-Marceau à Orléans : décision repoussée à la fin novembre », La République du Centre, 10 novembre 2023.
  5. Marie Guibal, « Le stationnement payant ne sera pas étendu aux quartiers Dunois-Madeleine-Châteaudun, ni ailleurs à Orléans », La République du Centre, 18 novembre 2023.
  6. « Premier bilan pour Olivier Carré, un an après avoir succédé à Serge Grouard à la mairie d’Orléans », La République du Centre, 21 juin 2016.
  7. Nicolas Da Cunha, « Deux mois après le passage au stationnement payant sur les boulevards et le centre-ville », La République du Centre, 30 avril 2016.
  8. En ligne on peut lire cet article passionnant d’Eric Charmes : « Haro sur le pavillon? » (14 juin 2022). On y trouve notamment ces propos : « Des simulations effectuées dans la couronne périurbaine de Lyon indiquent qu’en se contentant de viser des pratiques déjà observées dans d’autres pays, et sans changer la structure des déplacements, on pourrait diminuer les consommations d’énergie d’environ 35 % avec le vélo et de 14 % avec le covoiturage (en comparaison, les gains à attendre de la promotion des transports collectifs sont de l’ordre de 4 %). L’atteinte de tels objectifs nécessite au demeurant des investissements conséquents. Pour le vélo par exemple, il est dangereux et inconfortable de pédaler au bord d’une départementale en rase campagne. Il convient donc de développer des voies cyclables protégées. Sur ce terrain, les actuels « plans vélo » sont loin du compte. »

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2 réponses

  1. 26 novembre 2023

    […] cette scène du court-métrage sur Shaun pourrait laisser croire que le film a été tourné dans Orléans-ville-parking (>fr) mais […]

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