Le frein à rétropédalage — par Mark Treasure

Quand Mark Treasure a fait le portrait de son « vélo hollandais » en 2012 il a écrit : « L’utilisation d’un frein à rétropédalage justifierait probablement un article à part entière, mais il n’est vraiment pas difficile de l’adopter. » Trois ans plus tard, il finissait par proposer un tel texte, agrémenté d’une vidéo de démonstration.
Voici la traduction de « Coasting » publié le 12 mai 2015 sur As Easy As Riding A Bike.

Je ne sais pas quel est le pourcentage de vélos aux Pays-Bas qui fonctionnent avec des freins à rétropédalage1, mais il doit certainement s’agir d’une proportion importante, peut-être même d’une majorité. Le signe révélateur est un guidon sans levier de frein (ou avec un seul levier de frein, pour la roue avant), et dans les villes néerlandaises, ce type de vélo est omniprésent.

En revanche, le nombre de vélos équipés de freins à rétropédalage au Royaume-Uni doit représenter une infime minorité du total global. Mon omafiets est l’un de ces vélos2 :

Je n’avais jamais fait de vélo avec frein à rétropédalage auparavant, j’étais un peu inquiet à l’idée de ne pas savoir m’en servir correctement, et j’hésitais à opter pour un frein à levier plus familier. Mais maintenant que j’ai roulé avec quelques années, je ne changerais pour rien au monde de frein arrière. C’est génial.

Le frein avant (à tambour) est actionné par un levier. Je suis donc en règle du point de vue de la réglementation britannique, car j’ai deux systèmes de freinage indépendants, un pour chaque roue3. Mais en toute honnêteté, ce n’est pas vraiment nécessaire – la plus grande puissance de freinage provient du frein à rétropédalage. C’est un frein efficace, en particulier parce que sur ce type de vélo, le poids du corps repose presque entièrement sur la roue arrière. Le frein avant fait presque figure de bonus.

Le frein à rétropédalage est basé sur le principe de la pédale de frein – pour ralentir, il suffit d’appuyer sur les pédales, exactement comme on appuie sur une pédale de frein dans une voiture. C’est de fait l’analogie la plus proche qu’on puisse proposer – une légère pression vers le bas, un léger freinage ; plus de pression vers le bas, un freinage plus fort ; si on se met debout sur la pédale, eh bien, la roue va se bloquer.

Je pense que c’est cette association avec le système de frein dans une voiture qui rend le freinage à rétropédalage assez intuitif. Freiner avec les pieds devient rapidement naturel – il n’a fallu qu’une semaine environ pour qu’un novice complet comme moi s’y habitue. Aujourd’hui, je me retrouve souvent à appuyer distraitement sur les pédales pour freiner sur mes autres vélos (qui ne sont pas équipés de ce type de frein), simplement parce que c’est devenu un mouvement naturel chez moi. (mes jambes ne rencontrant aucune résistance, mon cerveau transmet instantanément le message à mes mains !)

Ce caractère « naturel » du geste n’est qu’un des avantages du frein à rétropédalage. Un autre avantage important est qu’il vous laisse les mains libres pour d’autres choses, en particulier se signaler aux autres usagers. Comme faire des gestes avec les mains est souvent nécessaire alors même qu’on est en train de ralentir, pour tourner ou indiquer sa manoeuvre dans un carrefour, il est beaucoup plus pratique et facile de laisser les pieds freiner, plutôt que de devoir relâcher le levier de frein pour indiquer sa trajectoire, puis de reposer la main, ou de faire un compromis en freinant avec d’une seule main tout en se signalant de l’autre.

Un autre avantage majeur concerne l’entretien. Comme le frein est actionné par la chaîne, qui fait déjà partie du vélo, il n’est pas nécessaire d’utiliser des câbles ou des leviers supplémentaires. Le vélo est plus propre, plus élégant, sans système de freinage à entretenir en plus de la transmission (qui est de toute façon protégée des intempéries).

L’inconvénient (pour moi du moins) est qu’avec un frein à rétropédalage, on ne peut pas faire tourner les pédales en arrière – du moins très peu avant que le frein ne se déclenche. Cela signifie que lorsqu’on s’arrête, il faut veiller à positionner les pédales dans une position qui permet de repartir. Impossible à l’arrêt de donner un « coup de pied » pour les repositionner.

En pratique, cela devient rapidement très naturel ; je montre dans la vidéo ci-dessous la façon dont je m’y prends :

La position de freinage la plus puissante est obtenue avec les pédales placées à 3 heures/9 heures ; et c’est une position assez bonne pour redémarrer.

Prêt à repartir.

Si par hasard vos pédales ne sont pas dans une position idéale pour repartir, la meilleure chose à faire est de reculer votre vélo de trente centimètres environ, en ramenant la pédale dans une position où le pied est en mesure d’appuyer dessus. Ou (comme je le fais parfois), on peut simplement pousser le vélo et utiliser l’élan pour recommencer à pédaler. Ce n’est pas bien gênant.

Il est également utile d’avoir une selle suffisamment basse pour que les pieds (ou au moins un pied) puissent atteindre le sol lorsqu’on est assis dessus, comme sur la photo ci-dessus. Cela signifie que vous n’êtes pas obligé de mettre du poids sur les pédales lorsque vous vous arrêtez, ce qui est délicat quand c’est votre système de freinage.

Avec ce type de vélo, une selle basse est confortable et naturelle dans tous les cas – il suffit de regarder le gars détendu sur la première photo de ce billet – donc toute idée de l’élever à une hauteur prétendument « optimale » pour le transfert de puissance ne convient pas vraiment. Les vélos de ce type sont faits pour le confort, et non pour les accélérations ou les performances.

Le seul autre inconvénient du frein à rétropédalage que je connaisse est que – en cas d’urgence – les pédales peuvent ne pas être instantanément dans la bonne position pour générer la meilleure puissance de freinage disponible (contrairement aux leviers de frein au guidon). Elles peuvent se trouver à la verticale, là où il n’est pas possible d’appliquer beaucoup de force vers l’arrière.

Que ce soit un point important ou non, je l’ignore – j’ai toujours été capable de m’arrêter assez brusquement dans les rares occasions où j’ai dû le faire. C’est peut-être parce que (du fait de la compensation des risques) je roule plus lentement, et plus prudemment, plus conscient de ce que des idiots pourraient faire, que je dois réagir d’une manière légèrement différente. Généralement, si je prends de la vitesse ou si je m’approche d’une situation où je dois m’arrêter, mes pédales « se reposent » dans la meilleure position pour s’arrêter, parallèlement au sol. Il est rare que je me retrouve à pédaler fort dans une situation où il y a de l’incertitude. Peut-être suis-je simplement plus âgé et plus sage !

Mais dans l’ensemble, je trouve que ce type de freinage convient parfaitement à ce type de vélo – facile, aisé, instinctif et efficace. Si je devais me procurer un autre omafiets, je choisirais sans hésiter un frein à rétropédalage.


Crédit photo de couverture : Alfredo Borba / CC BY-SA

Notes

  1. Des infos mécaniques très détaillées à retrouver (en anglais) sur le site du célèbre Sheldon Brown. En français, des explications plus accessibles chez Cyclable. NdT
  2. À Orléans, le camarade JP, avec son BluaMarko – un VSF T100 reborn – est un fier représentant de cette tradition. NdT
  3. La même réglementation s’applique en France. NdT

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