Un pont cyclable en bois à Oirschot — par Bicycle Dutch
Si JP a été voir à quoi ressemble désormais le viaduc ferroviaire entre Sully et Saint-Père-sur-Loire transformé en un pont vélo/piéton confortable « dont le sol est couvert de lattes », c’est un ouvrage d’art beaucoup ambitieux – ne serait-ce qu’au niveau de sa mise en oeuvre – que nous fait découvrir Mark Wagenbuur dans ce reportage réalisé à une bonne heure de vélo de chez lui.
Voici la traduction de « A wooden cycle bridge in Oirschot » publié le 24 juin 2020 sur Bicycle Dutch.
Les trains étant toujours limités aux seuls déplacements essentiels, je suis obligé de trouver des sujets pour mon blog à portée de vélo. Par chance, un nouveau pont cyclable en bois tout à fait remarquable a été inauguré le mois dernier à Oirschot, à environ 23 kilomètres de chez moi. Je ne l’ai découvert que récemment, mais j’ai pu m’y rendre à vélo dès le lendemain. Je peux maintenant vous montrer quel ouvrage d’art magnifique c’est !
Bien qu’il ne soit pas très éloignée de Bois-le-Duc, le bourg d’Oirschot est beaucoup plus proche d’Eindhoven et de Tilbourg et est davantage relié à ces deux villes. Cela signifie que je n’avais pas du tout entendu parler de ce pont. Je me suis déjà rendu à Oirschot en vélo pour vous montrer le bel itinéraire cyclable qui relie Oirschot à Boxtel et c’est ce même chemin que j’ai suivi présentement. Il m’est si familier que j’ai pu diriger mes roues sans avoir à consulter une seule fois la carte sur mon téléphone. Après un peu plus d’une heure, j’ai atteint le superbe pont et j’ai passé deux heures dessus et autour, à l’admirer et à le filmer. J’y suis resté beaucoup plus longtemps que prévu, mais j’ai aussi apprécié les sandwiches que j’avais apportés avec moi et j’ai pris tout mon temps.
Le pont relie un nouveau quartier au sud du canal Wilhelmine au centre historique d’Oirschot, mais il fait également partie de la « coulée verte » vers Eindhoven, en cours d’aménagement à environ 14 kilomètres au sud-est. Je vous ai montré la partie de cette coulée verte du côté d’Eindhoven (judicieusement appelée Oirschotsedijk) dans mon portrait d’Eindhoven il y a quelques années. Cette route a été transformée en une piste cyclable en 2013. La décision de construire ce pont a été prise en 2015.
Le fait que le pont soit construit en bois s’explique par le fait que ses concepteurs désiraient que le pont s’intègre dans cette coulée verte qui sera principalement utilisée pour les loisirs. L’azobé, un bois tropical imputrescible, a été choisi pour construire ce pont en treillis, mais il y a aussi des éléments en acier et en brique. Les rampes sont soutenues par de minces colonnes d’acier qui maintiennent les perspectives visuelles dégagées. La travée principale du pont repose sur deux piliers en béton revêtus de briques rouges. Les rampes sont en acier de couleur terre qui s’adaptera au réaménagement paysager (d’autres arbres seront plantés plus tard autour du pont.) La travée principale a été construite à Kampen. Elle a été expédiée en une seule pièce (95 tonnes) au travers des Pays-Bas. L’itinéraire, d’une longueur impressionnante de 245 kilomètres, a conduit le ponton et le tablier du pont via le lac IJssel et un certain nombre de rivières et canaux jusqu’à Oirschot. Le pont a été construit par la même entreprise qui a construit le pont en bois à Harderwijk. Je vous ai déjà montré ce pont. J’ai également écrit sur deux autres ponts en bois pour cyclistes, l’un à Bois-le-Duc et l’autre à Grubbenvorst.
L’itinéraire impressionnant que le pont a dû suivre (à travers la moitié du pays) depuis le chantier où il a été construit jusqu’à Oirschot.
La conception de ce nouveau pont est très bien équilibrée et certaines caractéristiques de conception ne sont pas tant visibles que perceptibles lorsque vous utilisez le pont. Par exemple, tous les virages du pont ont exactement le même grand rayon. Cela rend le trajet très confortable. Les pentes ajoutent également au confort. Les pentes sont très douces : seulement 2,65 % du côté nord et 3,1 % du côté sud. C’est bien inférieur à la pente maximale de 5 % qui figure dans les recommandations néerlandaises. Il est tout à fait possible pour les personnes de tous âges et de toutes conditions d’emprunter ce pont. Il n’y a pas non plus de problème pour conduire une poussette ou un fauteuil roulant et les personnes en « scooter de mobilité » pourront également utiliser facilement le pont. Les piétons peuvent prendre les escaliers comme raccourci. Les escaliers sont munis de gouttières, ce qui permet de monter un vélo. Cela semblait un peu too much au début, mais j’ai vu une jeune fille utiliser les escaliers tout en criant à sa grand-mère « tu vois, c’est plus court comme ça ». Mais sa grand-mère préférait les rampes, beaucoup plus pratiques. La longueur totale du pont et des rampes d’accès est de 280,5 mètres, dont 40,5 mètres constituent le pont proprement dit sur le canal. La largeur utile du tablier est de 4 mètres. La largeur totale du pont est plus importante si on tient compte des garde-corps et des poutres. Le revêtement du tablier est en bois, mais il est doté de bandes antidérapantes pour le rendre plus sûr lorsque le bois est mouillé par exemple. La nuit, le pont est magnifiquement éclairé par des luminaires en haut de la travée principale et des lumières LED dans les balustrades. Malheureusement, il fait jour jusqu’à près de minuit maintenant, alors je n’ai pas pu le filmer.
Le pont traverse le canal en diagonale. C’était un choix délibéré, car de cette façon, le clocher de l’église principale d’Oirschot est parfaitement aligné avec le pont. Ces perspectives visuelles ne faisaient pas seulement partie de la conception, elles étaient également une source de préoccupation des habitants du coin. En 2016, lors de la consultation publique, les riverains ont exprimé leur crainte que les personnes se trouvant sur les rampes du pont se retrouvent à la même hauteur que les fenêtres de leurs chambres avec une vue directe dans les pièces. La municipalité a déclaré que l’empreinte du pont était maintenue aussi faible que possible afin que les rampes d’accès soient situées aussi loin que possible et que cela ne poserait pas de problème majeur.
Les travaux de construction proprement dits sur le site du pont ont débuté à l’été 2019. Le pont devait être terminé à la fin de 2019, mais un conflit a surgi entre la municipalité et l’entreprise Ballast Nedam. Cette entreprise a également construit l’énorme pont cyclable de Nigtevecht que je vous ai déjà montré. Il a été établi que la municipalité avait fourni de mauvaises informations à l’entrepreneur, ce qui a entraîné des calculs erronés et causé des problèmes de mise en oeuvre. Le conflit a entraîné des retards et même une enquête officielle sur la façon dont l’appel d’offres public avait été géré. En fin de compte, la municipalité a dû payer 500 000 euros de plus à l’entreprise et le retard a entraîné des coûts supplémentaires de 200 000 euros. Ce montant s’ajoutait au 1,5 million d’euros que la municipalité avait budgété pour le chantier. Le reste du coût, soit 1,9 million d’euros, a été pris en charge par la province du Brabant-Septentrional, ce qui porte le coût total de l’ouvrage à 4,1 millions d’euros. Après un audit technique, les piliers du pont du côté nord se sont avérés insuffisamment solides, leurs fondations ont dû être renforcées. Une fois ce problème résolu, le tablier principal du pont a pu être posé en février 2020. Il a fallu deux énormes grues de 400 tonnes pour soulever le pont de la barge sur laquelle il était arrivé. Willem van Gils a filmé l’opération depuis un drone et il m’a aimablement permis d’utiliser quelques secondes de ses images dans ma vidéo. Il restait encore beaucoup à faire sur le site, mais le pont a finalement pu être ouvert le 20 mai, bien que très discrètement en raison de la pandémie.
Le pont a été appelé pont Stönner-Meijwaard pour honorer deux soldats morts pendant la Seconde Guerre mondiale lors de la libération d’Oirschot en 1944. Le pont est ainsi lié à l’histoire locale et à des itinéraires cyclables que les personnes intéressées peuvent suivre pour en savoir plus sur la guerre. La Seconde Guerre mondiale n’est jamais très loin aux Pays-Bas. Il existe une volonté de ne pas oublier les horreurs de la guerre et le fait que des gens ont donné leur vie pour y mettre fin. Je vous ai montré l’itinéraire cyclable qui passe dans le musée de la guerre à Overloon et le Tour de la liberté organisé pour rappeler à tout un chacun que nous vivons en liberté depuis 70 ans.
Ce pont a été admiré par de nombreuses personnes qui sont venues y jeter un coup d’œil, y compris le jour où je l’ai visité pour filmer. Cet ouvrage remarquable va devenir un monument distinctif d’Oirschot et désormais une raison supplémentaire de s’y rendre à vélo pour beaucoup de monde.
J’adore : « je suis obligé de trouver des sujets pour mon blog à portée de vélo. Par chance, un nouveau pont cyclable en bois tout à fait remarquable a été inauguré le mois dernier à Oirschot, à environ 23 kilomètres de chez moi. »
Autrement, parler de pont à quelques jours d’une élection pour laquelle les 3 prétendants ont des projets (même si pour un c’est davantage caché) de passerelles toutes plus inutiles que les autres car dédiées aux loisirs, à rien d’autre et certainement pas à des déplacements efficaces… c’est de la provocation 😀
Un tel projet serait utile dans la cité johanique entre une vélorue qui partirait du pôle mairie-cathédrale-école-d’art suivrait les rues Bourdon-blanc & tour neuve, traverserait Loire pour afluvir à la CAF.
Visiblement, les personnes compétentes savent palier les différences de niveau.
JPB