Mon sentiment sur le vélo à Anvers — par Bicycle Dutch

La Belgique flamande à l’honneur ! À l’été 2019 je m’étais rendu dans la ville de Louvain et en étais revenu enchanté. Les camarades tourangeaux du Collectif Cycliste 37 ont publié tout récemment un article inspirant sur la magnifique ville de Gand. Mark Wagenbuur quant à lui s’est rendu début mars dans sa cousine Anvers. Ce qui me permet de vous proposer la traduction de « An impression of cycling in Antwerp » publié le 15 avril 2020 sur Bicycle Dutch.

Avant que la crise du Coronavirus ne frappe l’Europe et que se rendre en Belgique comme touriste ne devienne interdit, j’ai passé cinq jours à Anvers. J’ai eu l’occasion pendant un jour de pouvoir pédaler longuement dans la ville et de filmer une partie des aménagements cyclables de la deuxième plus grande ville de Belgique.

La piste cyclable le long de L’Escaut était très empruntée au matin du vendredi 6 mars 2020. Cet itinéraire permet facilement de contourner les rues étroites du centre historique.

Anvers est une ville où il est très agréable de se déplacer à vélo. Elle est compacte, les aménagements cyclables s’améliorent d’année en année et il est facile de se procurer un vélo. Sur le site Visit Antwerp les visiteurs sont invités à découvrir la ville à vélo. Le site propose neuf parcours et recense les loueurs de vélo.

La Grand-Place est l’une des principales attractions touristiques de la ville. On voit des gens la traverser à vélo mais je ne suis pas complètement sûr que ce soit autorisé.
Le Museum aan de Stroom (MAS) est situé sur les quais de l’ancien port de la ville.

La ville est fière que « grâce aux plus de 500 km d’itinéraires cyclables sûrs et confortables beaucoup de gens se déplacent à vélo quotidiennement. Les véloroutes, les pistes cyclables et le jalonnement numéroté permettent de rendre les déplacements à vélo simples et intuitifs. » La ville donne un plan des itinéraires cyclables et propose également un calculateur d’itinéraire pour PC ou smartphone.

La rue qui mène à la gare (à l’arrière-plan) accordait avant beaucoup plus de place à la voiture. On peut désormais rejoindre le centre ville sans en rencontrer une seule.
Tout le monde estime que le parking à vélo souterrain de la gare centrale a bseoin d’améliorations. Anvers cherche à s’inspirer des installations néerlandaises et constate que celui-ci n’est pas assez qualitatif. Cela dit, comparé à ce que font les autres pays en la matière, ce n’est vraiment pas si mal.

C’était la troisième fois que j’utilisais le système de vélo en libre service d’Anvers. Ce système complètement automatisé de troisième génération dispose de stations où il est possible d’emprunter et de rendre un vélo. Les premières 30 minutes d’utilisation sont gratuites et les touristes comme moi peuvent se procurer un pass de 24h ou d’une semaine. J’ai souscrit à cette deuxième formule pour mon séjour de 5 jours et j’ai utilisé ce système tous les jours. Selon Wikipédia Velo Antwerp compte maintenant près de 300 stations et 4200 vélos. Les vélos disposaient à l’origine d’une transmission acatène comme on peut le constater dans les photos de mon billet de 20181. Mais les nouveaux vélos livrés en janvier 2019 pour augmenter la flotte disponible disposent d’une transmission classique par chaine. Ce service est principalement utilisé par les habitants. Plus des deux tiers des abonnés (67,1 %) vivent à Anvers. Les titulaires d’un abonnement annuel à 49 € sont environ 60000. Le pass hebdomaire que j’ai pris coûte 10 €.

Avant passaient ici plusieurs voies de circulation. Un tunnel a été creusé pour libérer en surface un espace entièrement piétonisé qui permet d’aller de la gare au centre ville sans croiser une seule voiture.

La splendide gare d’Anvers-Central possède un parking à vélo souterrain d’une capacité de 1000 places ouvert en 2006. Son accès est gratuit mais il a mauvaise réputation car des problèmes de sécurité se posent. Il n’est gardé qu’en journée et beaucoup de gens le jugent sombre et anxiogène. Il semble que des SDF y passent la nuit et le parking est sale et sent mauvais. La ville s’est rapprochée des autorités ferroviaires pour voir quelles améliorations pourraient être financées en rendant payant l’accès au parking au moins en partie. Certains partis politiques sont contre cet accès payant, et quelqu’un a fait remarquer qu’on ne peut pas d’un côté verbaliser les gens qui garent leur vélo dans la rue et dans le même temps faire payer la seule alternative de stationnement. L’antenne locale du Fietsersbond est également contre. Ils renvoient à la pratique néerlandaise en la matière et espèrent que les premières 24 h resteront gratuites.

La plupart des Anversois pédalent en position droite. On voit pas mal de personnes avec casques et vetements de haute visibilié. Peut-être est-ce dû au fait que les vêtements imperméables proposent souvent cette option et qu’il pleuvait quand j’ai filmé l’endroit à l’heure de pointe du matin.

Il est intéressant de relever combien les points de vue des Fietsersbonds belge et néerlandais sont proches. En accord avec le Cycling Advisory Board, ils veulent une largeur minimale de 2 m pour toute nouvelle piste cyclable unidirectionnelle et de 3 m pour les bidirectionnelles (et même davantage sur les itinéraires très fréquentés) et ils ne veulent pas entendre parler de limitations de vitesse sur les voies cyclables et estiment qu’il revient à chacun d’adapter sa vitesse aux conditions de circulation. Leur position sur le casque ne me dépayse pas :

« Un casque est une mesure individuelle de protection qui ne traite en aucune façon de sécurité routière. Pour le dire sans détour, pédaler sur une bande peinte juste à côté d’une voie où les voitures roulent vite ne devient pas plus sûr quand vous portez un casque. En cas d’accident l’impact peut être moins important, mais porter une casque ne rend pas la situation plus sûre pour autant. Pour le dire autrement : cette mesure créé le sentiment qu’on fait quelque chose en matière de sécurité routière sans s’attaquer aux véritables causes du danger. »

Il existe toutefois des différences, parfois dues à la réglementation en matière de limitation de vitesse en agglomération. Les Belges ont adopté le principe 30/50/70. Ils le traduisent ainsi : pour les rues limités à 30 km/h la chaussée partagée est possible, à 50 km/h la bande cyclable est l’aménagement minimal et à 70 km/h l’aménagement dédié et séparé est indispensable. Côté néerlandais, la piste cyclable est la règle dès 50 km/h et la vitesse de 70 km/h n’est plus autorisée en agglomération.

Les feux tricolores les plus récents disposent d’un répétiteur ! Ce qui est bien pratique puisqu’il n’est plus nécessaire de lever les yeux quand on est arrêté au droit du poteau. Hélas, cette piste cyclable semble plus étroite que les 2 m minimaux recommandés.

Les Belges ont encore besoin de manifester pour obtenir de meilleurs aménagements cyclables. Il existe aussi des actions sympathiques comme ces militants qui jouent de la musique au feu rouge pour revendiquer des phases de feu plus courtes. Certains feux rouges durent encore jusqu’à 3 minutes à Anvers, ce qui est bien trop long. Après trente secondes d’attente, piétons et cyclistes commencent à s’impatienter et vont être tentés, on les comprend, de s’affranchir de la signalisation, ce qui génère des situations dangereuses qu’on peut prévenir en raccourcissant les phases de feu.

Cette requalificaton récente souffre de défauts d’après moi. Je ne comprends pas pourquoi la piste cyclable et la contre-allée se croisent plusieurs fois. Cela génère des conflits potentiels non nécessaires Et puis la piste cyclable est bidirectionnelle sauf aux endroits où une contre-allée existe. Les personnes à vélo pédalant « en sens inverse de la circulation » se retrouvent soudainement à utiliser la contre-allée à contresens (d’où le panneau « interdit aux vélos »). C’était déjà comme ça avant la requalification mais je pense que c’est une occasion râtée d’améliorer les lieux. L’aménagement est maintenant en place pour plusieurs dizaines d’années. La piste cyclable aurait dû être placée à l’extérieur de la contre-allée (à gauche sur la photo), si nécessaire. (Après tout, la contre-allée est également cyclable.)

La ville essaie de rendre les déplacements à vélo sûrs. Dans les premiers mois de 2019, plus d’un millier d’automobilistes ont été verbalisés pour comportement inadapté dans les vélorues. Parmi ces contraventions 99 concernaient le dépassement de cyclistes qui est interdit en Belgique. La fietsstraat (vélorue) et sa signalisation sont entrées dans la législation belge. Bien que le panneau retenu soit identique à ceux utilisés fréquemment aux Pays-Bas, les Néerlandais n’ont pas modifié leur code de la route : ni la vélorue ni le panneau n’ont d’existence légale (pour le moment).

L’une des plus récentes pistes cyclables d’Anvers. Surface agréable et bordures de niveau avec la piste. Seule sa largeur ne respecte pas les recommandations du Cycling Advisory Board (3 m pour une piste bidirectionnelle).

Il est évident qu’Anvers change de physionomie. En partie parce que des lignes de tram sont prolongées et que des axes importants ont été complètement requalifiés. Hélas parfois la ville construit des tunnels au lieu de chercher à détourner ou réduire la circulation, mais au moins les rues en surface s’en trouvent améliorées. J’avais mentionné la requalification de la rue qui longe L’Escaut dans mon billet de 2018. Ma vidéo montre qu’aujourd’hui la requalification de la route principale appelée Italiëlei est presque achevée. La zone piétonne est également étendue. Anvers aménage un cheminement entièrement sans voiture depuis la gare jusqu’aux berges du fleuve. Des chantiers sont visibles un peu partout dans le centre ville. Anvers n’a pas complètement compartimenté son centre ville comme Gand l’a fait en 2017. Le défi pour Anvers est lié aux nombreux parkings dont il faut maintenir l’accès dans le centre. La ville a mis en place un plan de circulation en 2016 pour mieux réguler leur accès tout en récupérant de l’espace pour piétonniser davantage certains endroits.

Cette piste cyclable récente le long de L’Escaut semble respecter la largeur minimale de 3 m.

Avec toutes ces mesures la ville change de visage. En tant que visiteur irrégulier depuis les années 1970 c’est déjà visible. Je me souviens d’avoir vu enfant des voitures dans des zones qui sont depuis longtemps piétonnisées. Dans les années 1980 j’ai même conduit une voiture dans la zone de la gare centrale, ce qui est désormais impossible, et dans la dernière décennie j’ai vu de nombreuses rues être requalifiées. Aux yeux des habitants il y a sans doute encore beaucoup de choses à améliorer d’un point de vue cyclable, mais se déplacer à vélo à Anvers est déjà très agréable. Lorsque le confinement aura pris fin j’espère et je souhaite que la situation revienne à ce que j’ai pu observer début mars.

Vidéo sur mon expérience d’Anvers à vélo au début de mars 20202.
(sous-titrage en français disponible)

Notes

  1. C’est aussi le cas du sytème de VLS orléanais Vélo’+. NdT
  2. On voit Mark Wagenbuur emprunter le tunnel sous L’Escaut. NdT

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1 réponse

  1. janpeire dit :

    Très bon billet qui fait rêver avec des pistes, cyclables uniquement, de 3m. Dans Orléans et son agglomération, pour à peine 2m80, nous devons nous contenter d’une voie verte en zigzag et avec des ressauts.

    Très beau bâtiment que le Museum aan de Stroom.

    Jpb

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